L'Âge des ténèbres

Que manque-t-il à ce film et que les deux autres (le Déclin et les Invasions) avaient? Je crois qu’il n’a pas pu, cette fois-ci, réussir complètement son « Big Picture » qui est pourtant sa marque de commerce professionnelle et ce qui fait de lui un grand réalisateur. J’essaie de traduire ce terme de « Big Picture » et je n’y arrive pas tout à fait. Je dirais que, cette fois-ci, il n’a pas réussi SA perspective d'ensemble historico-artistico-humaine (!) ou quelque chose du genre… je sais, je sais, c’est pompeux! Pourtant tout y était : les références à l’histoire, aux arts, à l’amour, à la mort, aux enjeux politiques, à la sexualité (masculine, il va sans dire), etc., etc. Je suis bien d'accord pour suivre un auteur cinématographique de talent et revoir l'absurdité du monde moderne, l'échec des couples, la profonde détresse des individus, la mort... mais cibole! , donnez moi une ceinture de sauvetage pour me sauver d’une noyade émotive ou mettez une rampe de sécurité pour que je ne tombe pas en bas du précipice, please! Dans ses deux autres films, Denis Arcand puisait dans l'histoire universelle et les arts pour nous tisser un fil conducteur (de secours) qui nous permettait de prendre conscience des travers de nos sociétés tout en gardant un espoir d’ordre « spirituel » envers la race humaine. En tant que public, j'aime et j’ai besoin de cette vision là. La tirade du cimetière faite par Didier Lucien (au bras de Véronique Cloutier) illustre ce propos et est digne de monsieur Arcand. Malheureusement, l'absence de cette vision fait que les scènes du film se retrouvent comme fragmentées. À mon avis, les 15-20 dernières minutes rachètent le film. J'y ai alors retrouvé le réalisateur que j’aime. La présence de la mer (bon le gag d'Hélène de Troie est lourd) et de la terre (jardin), les images simples mais essentielles de cuisine, l’illustration d’un travail valorisant, la possibilité d’un nouvel amour (? ) et d’une future occupation pour le héros (? )…tout cela nous recentre et nous élève. Monsieur Arcand... ouvrez moi les yeux en me cognant la tête sur le téléviseur mais remontrez moi encore que vous aimez le genre humain... il en a bien besoin. Je donne malheureusement un 7 faible.